Par Mitterand Masamuna, Expert Journaliste Économique
Le Cameroun, ce joyau de l’Afrique centrale, s’apprête à déployer une stratégie d’exploitation minière d’envergure qui ne passe pas inaperçue dans les cercles économiques. Dans une annonce récente qui a suscité l’intérêt de la communauté financière internationale, le ministère des Mines, de l’Industrie et du Développement Technologique (MINMIDT) a révélé un plan ambitieux visant à dynamiser le secteur minier du pays au cours de la période quinquennale 2023-2027.
Le gouvernement camerounais, fort de sa collaboration étroite avec des entreprises nationales et internationales, aspire à donner naissance à pas moins de douze projets miniers d’ici 2027. Cette entreprise audacieuse est une réponse stratégique à la nécessité de valoriser les ressources précieuses enfouies dans le sous-sol camerounais.
Les Joyaux du Sous-Sol Camerounais
Dès cette année, les acteurs économiques du Cameroun s’attendent à voir émerger trois projets majeurs dans le secteur de l’exploitation du minerai de fer. Parmi ces initiatives, les gisements de fer de Kribi-Lobé, chapeautés par le géant chinois Sinosteel, prévoient d’extraire annuellement pas moins de 10 millions de tonnes, avec des réserves prouvées atteignant la colossale quantité de 632 millions de tonnes. Les projets de d’Akom 2 Bipindi-Grand-Zambi, estimant leurs réserves à 1,2 milliard de tonnes, et de Mbalam, géré par la société Cameroon Mining Company, une entité sous le contrôle du singapourien Coconut Logic Holdings, ambitionnent également d’ajouter leur contribution à cette manne minérale, avec une estimation de 805 millions de tonnes de minerai de fer à une teneur exceptionnelle de 62,3%.
Dans le même souffle, cette année verra également le lancement de la première phase de trois autres projets miniers. Notable parmi ceux-ci, le projet Nkamouna-Lomié consacré au cobalt, au nickel, et au manganèse, parrainé par la société américaine Phoenix Mining. De plus, la petite mine d’or de Mborguéné, avec un potentiel impressionnant de 2 millions d’onces d’or, devrait également entrer en exploitation conformément aux plans gouvernementaux.
Moyen Terme : Vers un Avenir Minier Rayonnant
La période 2024-2025 marquera le début de travaux majeurs pour la construction de la mine de Colomine, située dans l’est du Cameroun. Les estimations laissent entrevoir un potentiel considérable, avec 485 000 tonnes prévues pour une production annuelle atteignant 500 kg.
Quatre autres projets d’envergure sont en préparation, notamment les projets de fer de Nkout Ntem et Ngovayang, ce dernier étant l’un des plus grands gisements du pays. Les estimations actuelles font état d’une réserve de 2 milliards de tonnes, une quantité susceptible d’atteindre 4 milliards de tonnes grâce à des opérations d’expansion futures. De plus, la présence du géant français Eramet à Akonolinga, engagé dans le développement du gisement de rutile de cette région, promet de redynamiser le secteur avec des réserves estimées à plus de 450 000 tonnes de rutile.
Les ambitions ne s’arrêtent pas là, avec des projets à moyen terme couvrant l’exploitation du minerai de bauxite à Minim-Martap, dans la région de l’Adamaoua, et l’exploitation aurifère à Bibemi.
Le Défi de l’Optimisme Gouvernemental
Toutefois, l’enthousiasme gouvernemental vis-à-vis du calendrier de ces projets ne saurait occulter les défis bien réels auxquels le Cameroun pourrait être confronté. Il est à noter que la majeure partie du sous-sol camerounais suscite l’intérêt de jeunes sociétés minières qui ne disposent pas toujours des ressources financières nécessaires pour exploiter ces richesses. Certaines d’entre elles pourraient même chercher à lever des fonds sur les marchés financiers internationaux, avant de se retirer sans réaliser d’exploitation substantielle.
Un exemple notable est celui de la société minière américano-canadienne Geovic Mining, qui détenait depuis 2003 le permis d’exploitation du gisement de nickel, de cobalt et de manganèse de Nkamouna. Malgré de grandes promesses, Geovic Mining n’a jamais pu extraire le moindre minerai de ce gisement. En 2022, soit 19 ans après l’obtention du titre d’exploitation et après des accusations de spéculation émanant du gouvernement, l’entreprise a finalement cédé ses actifs à Phoenix Mining, une autre junior-minière dépourvue d’une expérience avérée dans le secteur.
Le Cameroun, résolu à diversifier ses sources de revenus dans un contexte de durcissement des conditions financières internationales et de volatilité des cours pétroliers, poursuit ainsi sa quête de monétisation de son sous-sol. Cette initiative n’est pas nouvelle, puisqu’une étude gouvernementale réalisée en 2014 avec l’appui de la Banque mondiale avait déjà identifié plus de 300 nouveaux gisements dans cinq régions du pays. Cependant, ces ressources demeurent largement sous-exploitées à ce jour.
Selon les données de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE), le secteur minier a contribué à hauteur de 1,73% aux revenus du secteur extractif camerounais en 2019, soit exactement 12,2 milliards de FCFA, un chiffre qui pourrait croître considérablement à mesure que ces projets miniers voient le jour et se développent. L’avenir du Cameroun est donc tracé dans les entrailles de sa terre, où des richesses insoupçonnées attendent d’être découvertes et exploitées.