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Route RN 115 : des milliers d’agriculteurs privés d’accès aux marchés

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Dans le silence pesant des villages du Kongo Central, une route oubliée raconte l’histoire d’une région en quête de renaissance. Longue de 100 kilomètres, la RN 115, qui relie Kwilu Ngongo à Kimpangu, traverse le territoire de Mbanza-Ngungu comme une artère vitale, aujourd’hui obstruée par des années de négligence et d’inaction. Les espoirs de milliers d’habitants se heurtent chaque jour aux crevasses profondes et à l’impraticabilité de ce tronçon essentiel.

« Nous vivons un cauchemar », confie Justin Luntomesa, un habitant influent de la région. Ses paroles traduisent l’exaspération d’une population isolée, incapable d’évacuer ses produits agricoles vers les marchés. Des sacs de manioc et des paniers de légumes, autrefois sources de revenus, s’entassent désormais dans des entrepôts rudimentaires, faute de moyens pour les transporter. Pendant ce temps, les prix des denrées essentielles flambent : le sel, le sucre ou encore les médicaments deviennent des trésors inaccessibles.

Ce déclin n’est pas qu’économique. Les communautés souffrent aussi sur le plan humain. Des distances autrefois banales entre villages sont devenues des périples infranchissables. Les malades, faute de routes praticables, peinent à atteindre les rares centres de santé. Une réalité qui amplifie les fractures sociales et renforce un sentiment d’abandon collectif.

Pourtant, une lueur d’espoir avait brièvement émergé. En avril 2023, le gouvernement avait signé un contrat ambitieux avec le consortium CRBC-Tecnovia, promettant la réhabilitation de cette route stratégique. Une cérémonie, marquée par la pose symbolique de la première pierre, avait galvanisé les attentes. Mais depuis, rien n’a bougé. Le béton des promesses s’est fissuré, laissant place à une colère sourde et des interrogations sans réponses.

Dans les discussions, la RN 115 n’est pas qu’un simple chemin. Elle représente la possibilité d’un avenir meilleur pour le Kongo Central. Si elle était modernisée, elle pourrait transformer la région en un hub économique, désenclaver les villages, et raviver l’espoir chez des milliers d’agriculteurs. Mais aujourd’hui, elle demeure un symbole de paralysie, un rappel quotidien des opportunités perdues et des priorités négligées.

L’urgence de cette réhabilitation dépasse les questions techniques. Elle touche au cœur des enjeux de développement rural, à l’équité sociale et à la capacité des autorités à répondre aux besoins fondamentaux des citoyens. Les appels des habitants, bien que répétitifs, résonnent comme un écho poignant d’une région qui refuse de sombrer dans l’oubli.

La route Kwilu Ngongo-Kimpangu attend toujours son second souffle. Dans un pays aux défis multiples, sa réhabilitation serait bien plus qu’un chantier : ce serait un acte de justice pour une région qui aspire à se relever.

— Peter MOYI

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