Le récent discours d’Ajay Banga, le nouveau président de la Banque Mondiale, résonne comme une promesse de « créer un monde sans pauvreté dans une planète durable ». Cependant, plutôt que de provoquer une transformation radicale du développement, la Banque Mondiale semble se concentrer principalement sur la lutte contre la pauvreté. Une noble cause, certes, mais qui, en l’absence d’un engagement responsable et d’actions concrètes, risque de se transformer en un simple exercice de marketing humanitaire.
Dans les pays en développement, l’institution préconise des réformes telles que la suppression des subventions à l’énergie et aux produits de base, censées assurer la viabilité de la dette à long terme. Cependant, ces mesures, combinées à la politique hasardeuse de « ciblage » ou « fléchage » des subventions, pourraient entraîner une inflation, des troubles sociaux et des situations évoquant les « printemps arabes ».
Derrière la façade séduisante de la lutte contre la pauvreté, la Banque Mondiale apparaît de plus en plus comme le chef de file d’un syndicat de bailleurs de fonds internationaux, aux côtés du FMI.
Les statistiques de l’année 2023 révèlent une augmentation alarmante de la pauvreté et une croissance inquiétante de l’écart de revenus entre les nations. Près de 700 millions de personnes vivent dans l’extrême pauvreté, et les pays en développement ont consacré un montant record de 443,5 milliards de dollars au service de leur dette, représentant leur premier poste budgétaire.
Face à ces perspectives économiques sombres, les taux de croissance les plus bas depuis trente ans, l’écart de revenus qui continue de se creuser entre pays riches et pays émergents, et la diminution de la population en âge de travailler à l’échelle mondiale, la Banque Mondiale est confrontée à un défi monumental.
Parallèlement, la gestion des migrations liées aux dérèglements climatiques et les inégalités de genre élargissent les paramètres à prendre en compte dans la résolution de la question du développement. Environ 184 millions de personnes vivent en dehors de leur pays de nationalité, principalement dans des pays à faible revenu, et la gestion de ces flux migratoires ne figure pas suffisamment dans les rapports de la banque.
Face à ces défis complexes, la Banque Mondiale doit impérativement descendre de la superstructure où elle s’est établie depuis l’échec des politiques d’ajustement structurel à la fin des années 2000. Il est temps de redéfinir le succès, non pas en termes de dettes remboursées, mais de vies améliorées.
par la rédaction