47 % de droits sur Madagascar, 17 % d’exportations menacées au Congo : le protectionnisme US frappe les matières premières africaines

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Trump
US President Donald Trump delivers remarks on reciprocal tariffs as US Secretary of Commerce Howard Lutnick holds a chart during an event in the Rose Garden entitled "Make America Wealthy Again" at the White House in Washington, DC, on April 2, 2025. Trump geared up to unveil sweeping new "Liberation Day" tariffs in a move that threatens to ignite a devastating global trade war. Key US trading partners including the European Union and Britain said they were preparing their responses to Trump's escalation, as nervous markets fell in Europe and America. (Photo by Brendan SMIALOWSKI / AFP)

Kinsasha – En 1930, le Smoot-Hawley Act américain avait aggravé la Grande Dépression en érigeant des barrières douanières massives. Près d’un siècle plus tard, l’administration Trump réactive ce scénario avec des tarifs douaniers ciblant 27 économies, dont huit africaines. « C’est un coup de marteau sur des clous déjà tordus », lance le ministre congolais des Finances, Nicolas Kazadi, lors d’un récent forum à Lubumbashi. L’économie congolaise, dépendante à 68 % des exportations minières selon la Banque centrale, redoute un effet domino.

Les droits de douane américains sur le cuivre congolais passeraient de 3 % à 22 %, alignés sur les taxes locales appliquées aux véhicules US. Une logique arithmétique qui ignore les asymétries : les exportations de la RDC vers Washington représentent 0,03 % de son PIB, contre 7 % pour le cobalt expédié vers la Chine. « On nous force à choisir entre la peste et le choléra », glisse un négociant de Kolwezi sous couvert d’anonymat. La Banque centrale du Congo relève une chute de 18 % des transactions transfrontalières au Sud-Kivu depuis l’annonce.

Le parallèle avec le dumping des années 1930 s’arrête là. Les nouvelles taxes frappent des secteurs clés : 87 % des textiles malgaches, 63 % des noix de cajou ivoiriennes. Le Vietnam, principal fournisseur américain de vêtements, anticipe des pertes équivalant à deux années d’investissements directs étrangers. L’Afrique du Sud, elle, voit son acier taxé à hauteur de 1,2 milliard de dollars annuels – trois fois le budget sanitaire du Lesotho.

Dans l’arrière-cour congolaise, les effets se mesurent déjà. À Kamituga, la coopérative minière Mungoti a suspendu ses livraisons de coltan, anticipant une baisse de 40 % des cours mondiaux. « Les acheteurs chinois jouent la montre, espérant une correction tarifaire », explique son directeur. Cette prudence rappelle les accords miniers de 2009, quand Pékin avait obtenu des contrats à taux préférentiel en échange d’infrastructures.

Le fleuve Congo, dont le cours naturel est altéré par les roches étrangères, symbolise cette économie sous influence. Les tarifs Trump pourraient accélérer le pivot asiatique des matières premières africaines. La Chine a accru ses achats de cuivre katangais de 22 % au premier trimestre 2023, d’après les douanes de Durban. Une tendance qui inquiète Bruxelles : l’UE importe 41 % de son cobalt congolais via des fonderies chinoises.

92 % des exportations africaines vers les États-Unis sont des matières brutes, contre 74 % de produits transformés en sens inverse. Le différentiel de valeur ajoutée rend la « réciprocité » théorique. Comme le rappelait l’économiste zambienne Dambisa Moyo, « l’Afrique paie deux fois : en ressources et en opportunités industrielles ». La facture de cette guerre commerciale s’annonce lourde. Qui l’encaissera ?

– Par M.KOSI

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