À Kinshasa, une récente mesure gouvernementale limitant la circulation des poids lourds exclusivement à la nuit provoque de sérieuses inquiétudes chez les chauffeurs concernés. Selon une enquête menée par l’Agence Congolaise de Presse (ACP), 40 chauffeurs sur les 50 interrogés soulignent des contraintes économiques et sécuritaires croissantes.
Edmond Kiamu, coordinateur des chauffeurs poids lourds transportant du ciment, explique clairement : « Nous avons du mal à respecter l’horaire imposé de 22 heures à 5 heures du matin. Cette mesure ne tient pas compte de nos réalités économiques ». L’enjeu économique est réel puisque la clientèle, active surtout en journée, se raréfie durant la nuit, réduisant ainsi le nombre de courses à une seule par nuit.
Ces chauffeurs, assurant notamment la livraison de matériaux de construction et de boissons, mettent en avant des défis significatifs liés aux infrastructures urbaines dégradées, au manque flagrant d’éclairage public et à l’absence quasi-totale de signalisation routière adéquate. Ces conditions compliquent dangereusement la conduite nocturne.
Outre l’aspect matériel, la question sécuritaire préoccupe fortement les transporteurs. Les agressions, vols et actes de vandalisme se multiplient pendant les heures nocturnes, exposant directement chauffeurs et manutentionnaires à un risque accru. La précarité du secteur informel, ajoutée à l’absence fréquente de primes spécifiques pour le travail nocturne, aggrave leur situation économique.
Face à ces difficultés, Edmond Kiamu plaide pour des aménagements réalistes. Il réclame notamment la création de zones logistiques nocturnes sécurisées, renforcées par un dispositif policier adéquat et un éclairage public suffisant. Selon lui, une concertation préalable avec les opérateurs économiques, les syndicats et les représentants locaux aurait permis d’élaborer une réglementation mieux adaptée à la réalité du terrain.
D’après une étude récente, la capitale congolaise compte environ 1,5 million de véhicules, exacerbant la congestion routière sur des axes essentiels comme Mitendi-By-pass ou Lumumba-14ème rue Limete. Toutefois, certains chauffeurs reconnaissent leur propre responsabilité dans ces embouteillages récurrents, évoquant erreurs humaines et contrôles policiers intempestifs comme des facteurs aggravants.
Pour pallier ces tensions, une solution proposée serait d’instaurer des horaires modulables, différenciés selon les marchandises et les quartiers concernés. Une plateforme de suivi logistique pourrait également être mise en place afin d’améliorer la transparence et réduire les abus potentiels.
Dans l’attente de résultats plus complets issus de commissions spécifiques, le gouvernement provincial a décidé de suspendre temporairement cette mesure controversée. Reste à voir si un dialogue constructif permettra d’établir un compromis viable, conciliant impératifs économiques et nécessités urbaines pour la capitale congolaise.
— M. KOSI






