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L’Évolution des Compétences de l’Union Européenne : Une Analyse Approfondie

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Lorsque l’on se plonge dans les textes fondateurs de l’Union Européenne, tels que le Traité sur l’Union Européenne (TUE) et le Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE), une question émerge : quel est le véritable partage des pouvoirs entre les États membres et l’Union Européenne ?

Au premier abord, on pourrait penser que les États détiennent une compétence générale tandis que l’Union Européenne dispose d’une compétence d’attribution. C’est en effet ce que semble indiquer le premier paragraphe de l’article 4 du TUE : « Conformément à l’article 5, toute compétence non attribuée à l’Union dans les traités appartient aux États membres. »

De même, les deux premiers paragraphes de l’article 5 du TUE semblent confirmer cette répartition des compétences. Le principe d’attribution régit la délimitation des compétences de l’Union, et l’Union n’agit que dans les limites des compétences que les États membres lui ont attribuées.

Cependant, une analyse plus approfondie révèle que cette compétence dite « générale » des États est en réalité plus complexe qu’il n’y paraît. Le principe de subsidiarité intervient pour transformer cette compétence générale en une compétence réellement « résiduelle ».

À quelques exceptions près, telles que les « décisions ayant des implications militaires » ou celles relevant de « la défense », l’Union Européenne peut potentiellement intervenir dans presque tous les domaines.

Avant d’expliquer comment le principe de subsidiarité a été inversé de manière délibérée, passant d’un principe descendant à un principe ascendant, il est important de rappeler les trois types de compétences définis par les traités.

Les compétences exclusives sont celles où l’Union dispose d’une compétence exclusive, telles que l’union douanière, la politique monétaire pour les États membres utilisant l’euro, ou la politique commerciale commune.

Les compétences partagées sont celles où l’Union partage la compétence avec les États membres, comme le marché intérieur, la politique sociale, ou l’environnement.

Enfin, les compétences d’appui sont celles où l’Union peut mener des actions pour appuyer, coordonner ou compléter l’action des États membres, par exemple dans les domaines de la santé humaine, de l’industrie, ou de l’éducation.

Il suffit de regarder les domaines couverts par chaque catégorie pour comprendre que l’Union Européenne a la possibilité d’intervenir dans une grande variété de secteurs, à l’exception notable de la défense.

Pour illustrer comment l’Union Européenne peut s’approprier une compétence non exclusive, prenons l’exemple des compétences partagées. Le principe de subsidiarité, tel que formulé dans le troisième paragraphe de l’article 5 du TUE, précise que l’Union n’intervient que si les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres, mais peuvent l’être mieux au niveau de l’Union en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée.

Cependant, il est crucial de noter que cette formulation actuelle du principe de subsidiarité diffère considérablement de son concept initial, qui aurait dû impliquer un transfert de compétence vers les États si l’action pouvait être réalisée de manière satisfaisante à ce niveau.

Ce changement subtil a été orchestré lors de la rédaction du traité de Lisbonne, contournant ainsi le référendum de 2005 par un vote en congrès. Cela a abouti à une transformation du principe de subsidiarité descendant en un principe ascendant, essentiellement technocratique.

Le quatrième paragraphe du même article a été conçu pour rassurer en établissant le principe de proportionnalité, qui stipule que l’action de l’Union ne doit pas dépasser ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs des traités. Cependant, les objectifs de l’Union sont formulés de manière très générale, ce qui laisse une marge d’interprétation considérable.

Dans la pratique, l’Union Européenne a progressivement étendu son emprise sur de nombreux domaines, grâce à la manipulation du principe de subsidiarité. Bien qu’il existe un protocole pour déterminer l’applicabilité de ce principe, les États membres ont souvent été laxistes dans son application.

En conclusion, l’Union Européenne semble aspirer progressivement les compétences des États membres, à l’exception de la défense et de l’armée, bien que même dans ces domaines, certaines dispositions textuelles limitent la souveraineté des États. Cela a des implications importantes, notamment en ce qui concerne l’influence croissante de l’Union Européenne en matière de politique étrangère, comme en témoigne la situation en Afrique.

Il est essentiel de reconnaître que l’Europe ne fonctionne ni comme une confédération ni comme une fédération, mais plutôt comme un système intégrant aux compétences de plus en plus étendues. Cette tendance vers une centralisation des pouvoirs suscite des interrogations quant à la diversité culturelle et sociétale qui faisait autrefois la richesse de l’Europe.

En définitive, l’Europe doit naviguer avec précaution entre l’intégration et le respect de la souveraineté nationale, en reconnaissant que la pluralité des voies peut être une source d’enrichissement plutôt que de division.

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