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Pourquoi le franc congolais tient bon face au dollar… mais menace de lâcher prise bientôt

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Le franc congolais reste stable face au dollar américain, affichant un taux de change de 2 871,69 CDF pour un dollar au 27 juin 2025, selon la Banque Centrale du Congo (BCC). Cette stabilité apparente est le résultat d’une politique monétaire extrêmement rigoureuse, qui maintient un taux directeur élevé à 25 %. Ce niveau, rare en région Afrique centrale, reflète une volonté claire de contenir l’inflation, qui, malgré un ralentissement, persiste à un rythme annualisé de 8,7 %. Cette inflation, supérieure aux standards régionaux, exerce une pression tangible sur le pouvoir d’achat, particulièrement sur les produits importés essentiels et certains biens locaux dont les coûts logistiques amplifient la hausse.

La BCC fait également usage d’instruments de stérilisation monétaire agressifs, avec des bons du Trésor offrant des rendements jusqu’à 25 % sur des maturités de 28 et 84 jours. Ces taux d’intérêt extrêmement élevés visent à réduire la liquidité bancaire, freinant ainsi les pressions inflationnistes, mais au prix d’un accès difficile au crédit pour le secteur privé, notamment les PME et les activités agricoles. Cette tension entre maîtrise monétaire et soutien à la croissance révèle la complexité du contexte économique congolais.

La dépréciation continue du franc congolais face à d’autres devises majeures comme l’euro, la livre sterling ou le yuan pèse aussi sur la compétitivité des importations indispensables, notamment dans les secteurs de l’énergie et de la santé. Cette situation accentue la vulnérabilité extérieure du pays et renchérit le coût des intrants, ce qui se répercute inévitablement sur les prix à la consommation.

Sur le plan macroéconomique, la base monétaire progresse de manière maîtrisée, à un rythme proche de 8,7 % sur un an, indiquant une politique budgétaire prudente. Cette approche limite pour l’instant les risques d’une spirale inflationniste, mais bride aussi les perspectives de relance économique. Le défi majeur reste la conciliation entre la nécessaire stabilité monétaire et la relance du financement de l’économie réelle. La politique actuelle, par son orientation restrictive, contribue à un environnement où la croissance demeure poussive, faute notamment d’un crédit accessible pour stimuler les investissements productifs.

À moyen terme, une révision à la baisse progressive des taux directeurs pourrait offrir un souffle nouveau à l’économie congolaise, à condition que l’inflation montre une tendance durable à la baisse. Par ailleurs, une réforme ciblée des droits de douane et une amélioration des infrastructures logistiques pourraient atténuer les coûts liés aux importations et renforcer la compétitivité locale. Le maintien d’un cadre monétaire strict doit être tempéré par des mesures incitatives pour le secteur privé afin d’éviter un étouffement prolongé de l’activité économique.

L’équilibre actuel illustre les tensions inhérentes à la gestion macroéconomique d’un pays confronté à des contraintes externes fortes et à une inflation encore résistante. La Banque Centrale du Congo se trouve face à un exercice délicat, où le moindre déséquilibre pourrait compromettre tant la stabilité monétaire que la fragile reprise économique.

— Peter MOYI

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