Par Mitterrand Masamuna, Journaliste Économique
La République démocratique du Congo a récemment été le théâtre d’une décision juridique d’une portée considérable, susceptible d’avoir un impact significatif sur l’arène politique du pays. Le 16 octobre 2023, la Cour constitutionnelle de la RDC a rendu une décision inattendue en décidant de poursuivre en justice, « par défaut, » l’ancien Premier Ministre Augustin Matata Ponyo, qui fait face à des allégations de détournement de fonds s’élevant à une somme colossale de 205 millions de dollars américains. Cette sombre affaire gravite autour des fonds initialement destinés à l’érection du parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo dans la province de Kwango.
Le protagoniste principal de cette saga juridique, Matata Ponyo, a invoqué des raisons de santé et une absence du territoire congolais pour justifier son absence à l’audience. Ses avocats ont plaidé pour un délai de 60 jours afin de permettre à leur client de comparaître devant la justice. Cependant, après une brève suspension, la Cour a tranché en faveur du défaut, laissant ainsi la défense de Matata Ponyo sans voix, au sens propre comme au sens figuré.
La décision de la Cour constitutionnelle n’a pas manqué de susciter des réactions passionnées parmi les observateurs et les acteurs politiques. Laurent Onyemba, membre du collectif d’avocats de l’ancien Premier Ministre, a qualifié cette décision d’injuste, arguant qu’elle ne garantissait pas le droit de la défense.
La somme astronomique de 205 millions de dollars américains, objet de cette affaire, devrait être allouée à l’ambitieux projet du parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo. Matata Ponyo maintient son innocence, clamant qu’il n’a jamais été impliqué dans un détournement de fonds aussi considérable.
L’enjeu politique ne saurait être sous-estimé dans cette affaire. En tant que candidat validé par la Centrale électorale en vue de l’élection présidentielle, Matata Ponyo est actuellement en lice pour devenir le prochain dirigeant de la RDC. Néanmoins, la décision de la Cour constitutionnelle pourrait avoir des répercussions substantielles sur son éligibilité, puisque cette instance doit statuer sur le maintien ou le retrait de sa candidature, conformément à la loi en vigueur.
En novembre 2020, l’Inspection générale des Finances (IGF), une institution directement liée à la présidence de la République, a publié un rapport révélateur. Ce rapport a mis en lumière le fait que sur les 285 millions de dollars américains décaissés par le Trésor public pour le parc agro-industriel de Bukanga Lonzo, 205 millions avaient été détournés. L’IGF a attribué le rôle d' »auteur intellectuel » de ce détournement à Augustin Matata Ponyo Mapon.
Il convient de noter que par deux fois auparavant, la Cour constitutionnelle s’était déclarée incompétente pour juger un ancien Premier Ministre, conformément aux dispositions légales en vigueur. Toutefois, le revirement récent de cette même Cour, la reconnaissant compétente pour juger les mêmes faits, n’a pas manqué de soulever des interrogations.
En fin de compte, le déroulement du procès de Matata Ponyo suscite un intérêt croissant au sein de l’opinion publique, qui cherche à démêler les fils de cette affaire complexe du parc agro-industriel de Bukanga Lonzo. La décision de la Cour constitutionnelle ne laisse personne indifférent, et elle pourrait avoir des répercussions significatives sur le paysage politique de la République démocratique du Congo.
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