Deux ans après le lancement du programme de relogement à Mukilango (Mont-Ngafula), aucun habitat n’a été remis aux sinistrés. Sur 57,48 millions USD budgétés, 54,05 millions USD ont déjà été payés, soit 94 % des crédits engagés, sans résultat tangible sur le terrain.
Un chantier annoncé pour 7 mois, enlisé depuis 27 mois
Présenté en juillet 2023 par le président Félix Tshisekedi pour répondre aux inondations meurtrières de 2022 (168 morts, milliers de déplacés), le projet de maisons préfabriquées devait être livré en sept mois. Vingt-sept mois plus tard, Mukilango ne montre ni logements achevés, ni réseaux d’eau et d’électricité, ni voies d’accès viabilisées. Les quelques structures visibles restent incomplètes.
Un rapport du Conseil présidentiel de veille stratégique (CPVS), conduit par François Muamba, pointe des retards massifs, des irrégularités dans l’attribution des marchés, l’absence de supervision technique et financière et des paiements effectués sans l’aval du Fonds national de l’habitat, organe chargé du suivi. La société Milvest, adjudicataire turque, n’a pas publié d’état d’avancement détaillé. L’administration ne fournit pas davantage de bilan technique, alors que l’essentiel des fonds a circulé.
Le différentiel entre les montants décaissés et l’absence de livrables interroge la chaîne d’exécution : contrôle des contrats, jalons de paiement, pénalités de retard, et mécanismes de réception provisoire. Sans cadencement clair liant décaissements et réalisations, le risque budgétaire se traduit directement par une immobilisation de trésorerie sans service rendu. Les ménages visés demeurent dans la précarité, deux ans après l’annonce officielle.
Cette situation s’inscrit dans un schéma déjà observé sur des programmes d’urgence : procédures contractuelles fragiles, suivi insuffisant, et débours avant vérification des prestations. L’impact est double : perte d’efficacité de la dépense publique et report du coût social sur des familles censées être relogées en priorité. Le projet, conçu pour une réponse rapide, devient une charge budgétaire sans effet mesurable.
Un rétablissement de la trajectoire passe par des mesures simples mais rigoureuses : audit technique sur site, révision des jalons contractuels, conditionnement strict des paiements à des livraisons vérifiées, activation des garanties de bonne exécution, et publication d’un calendrier de rattrapage avec volumes et dates de remise des unités. Sans ces garde-fous, les 54,05 millions USD déjà dépensés resteront une dépense sans produit, et la promesse de 1 000 maisons, une ligne vide dans les comptes de l’État.
— Mitterrand MASAMUNA






