Kandi, Bénin – Depuis le coup d’État contre le président Mohamed Bazoum le 26 juillet dernier, les conséquences économiques se font de plus en plus ressentir à la frontière entre le Bénin et le Niger. Plus d’un millier de camions, transportant des denrées précieuses, sont immobilisés depuis plus d’un mois, créant une situation économique délicate dans la région.
L’impact du blocus sur les transporteurs
Ces riches cargaisons, composées de céréales, d’huile, de produits nutritionnels spécifiques pour les enfants souffrant de malnutrition, et de médicaments, sont cruciales pour atténuer la crise alimentaire qui sévit dans cette région du Sahel, où une insurrection islamiste a déjà contraint près de 250 000 personnes à quitter leur foyer.
Depuis le coup d’État, l’espace aérien a été fermé par la junte nigérienne le 6 août, ne rouvrant aux vols commerciaux que le 4 septembre. Cependant, le blocus économique imposé par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) demeure en vigueur, laissant les camions bloqués dans la zone.
Côté béninois, la file de véhicules à l’arrêt s’étend sur près de 25 kilomètres depuis le poste frontière de Malanville. Pour les transporteurs, cette situation se traduit par des pertes financières considérables. Les prix des céréales ont augmenté de manière significative depuis le début de cette crise économique, aggravant la précarité alimentaire.
Des enjeux humanitaires pressants
Selon le Programme alimentaire mondial (PAM), environ 6 000 tonnes de marchandises fournies par l’agence des Nations unies sont actuellement retenues aux frontières du Niger. Djaounsede Madjiangar, porte-parole de l’organisation, tire la sonnette d’alarme : « Nous pourrions nous retrouver avec 10 millions de personnes incapables de se nourrir. Les besoins humanitaires augmentent, et le temps presse. »
Les appels à la réouverture de la frontière
La situation ne fait qu’empirer pour les transporteurs routiers. Les conditions de vie se dégradent chaque jour, avec des conducteurs pris au piège de cette crise économique. « Je suis bloqué à Malanville depuis le 26 juillet. Il pleut en permanence, et il n’y a plus rien à manger car les vendeurs de rue qui nous ravitaillaient au début ont disparu. Beaucoup de conducteurs font des crises de paludisme et ils n’ont pas de médicaments. Nous sommes épuisés », déplore Adamou Sifou Amadou, un chauffeur nigérien.
Abdulrazak Koffi Bandele, transporteur et syndicaliste basé à Kandi, exprime son inquiétude quant à l’avenir : « Qui va payer ? Le transporteur ? Le chauffeur ? Le propriétaire de la marchandise ? Les assurances ? On n’en sait rien. Nous subissons déjà une perte colossale, et nous souffrons beaucoup. Il faut que la frontière s’ouvre, et que le gouvernement béninois nous entende. »
La suggestion du président du Nigeria et de la CEDEAO, Bola Tinubu, d’une transition de neuf mois pour la junte nigérienne a été immédiatement rejetée par l’organisation régionale. Les acteurs internationaux s’inquiètent des conséquences d’une intervention armée pour rétablir l’ordre constitutionnel, notamment sur la sécurité des transporteurs routiers et la stabilité de la région. La frontière reste ainsi le point de friction économique majeur dans cette crise politique en évolution constante.