La République démocratique du Congo entend redessiner son avenir économique à travers un plan de reconstruction de ses infrastructures estimé à 58 milliards de dollars, inscrit dans le cadre du partenariat stratégique annoncé avec les États-Unis pour un montant global de 500 milliards de dollars. Présenté le 27 mai 2025 à Kinshasa par le ministre du Commerce extérieur, Julien Paluku, ce plan cible des axes concrets : routes nationales, voies de desserte agricole et développement du potentiel foncier.
L’approche proposée repose sur des estimations chiffrées qui traduisent une vision pragmatique. Le coût moyen d’un kilomètre de route est estimé à 1 million USD, ce qui, à l’échelle de 20 000 km de routes à construire, mobiliserait déjà 20 milliards de dollars. À cela s’ajoute une projection audacieuse dans le secteur agricole : 80 millions d’hectares exploitables, avec un investissement de 1000 dollars par hectare, pourraient générer un flux de 80 milliards de dollars. Des montants bien supérieurs à l’enveloppe américaine actuellement sur la table.
Julien Paluku n’hésite pas à pointer ce déséquilibre. Face à un potentiel minier estimé à 24 000 milliards de dollars, selon plusieurs études internationales, le financement américain semble modeste. Pour lui, « la question n’est pas seulement de signer des engagements, mais de réfléchir à leur cohérence avec la réalité économique et géologique du pays ».
Ce plan directeur n’est pas une liste de souhaits. Il s’inscrit dans une volonté manifeste de repositionner la RDC au cœur des chaines logistiques régionales et continentales, tout en mettant en valeur ses atouts fonciers, miniers et humains. À condition que les projets soient pilotés avec méthode, appuyés par des capacités techniques, et surtout, qu’ils soient ancrés dans des réalités locales.
Des voix critiques se lèvent aussi. Un économiste interrogé estime que « l’annonce d’un partenariat de 500 milliards ne peut suffire à elle seule. Il faut garantir une capacité d’absorption des projets, assurer leur viabilité, et encadrer les fonds par une gouvernance ferme, sinon le pays risque de se retrouver avec un énième plan ambitieux resté au stade de la promesse. »
Le défi est donc double. D’une part, traduire les projections chiffrées en feuilles de route opérationnelles. D’autre part, veiller à ce que l’exécution des projets ne soit pas freinée par les lenteurs administratives ou les dysfonctionnements habituels du secteur public. Pour y parvenir, les experts recommandent la mise en place d’une cellule technique interministérielle chargée de coordonner les projets relevant de ce méga-accord, en lien avec les bailleurs de fonds et les agences d’exécution.
Ce projet intervient dans un contexte où la RDC cherche à se dégager de son image de « scandale géologique sous-exploité » pour devenir un acteur proactif des chaînes d’approvisionnement globales, notamment en minerais critiques. Mais la transition ne se fera pas sans discipline budgétaire ni volonté politique.
Le cadre offert par ce partenariat américano-congolais ouvre une fenêtre. Reste à savoir si Kinshasa saura s’en saisir pour bâtir des routes, irriguer des terres, et surtout, sortir des modèles d’aide pour entrer dans une logique de co-investissement durable.
— M. MASAMUNA






