Le 28 octobre 2025, le ministre de la Justice Guillaume Ngefa a ordonné des poursuites contre l’exploitation illégale au Lualaba. Au-delà du signal politique, le dossier met à nu un système où falsification des documents, intrusions de sites et complicités administratives et sécuritaires alimentent un trafic qui assèche les recettes publiques et fragilise la traçabilité des minerais.
Abus documentés, complicités présumées et pertes pour l’État
Le rapport de la Commission nationale de lutte contre la fraude minière (CNLFM) décrit un schéma précis : occupations illégales de concessions, contrebandes organisées et documents de traçabilité falsifiés. Des autorisations sortent des circuits réguliers, des cargaisons de cobalt et de cuivre quittent Kolwezi et Likasi par des voies parallèles. Résultat : des recettes douanières évaporées et des coûts supplémentaires pour les opérateurs formels qui tentent de sécuriser leurs périmètres.
Les sites de Kamoto Copper Company (KCC), filiale de Glencore, et d’Eurasian Resources Group (ERG) sont régulièrement envahis. En juillet 2025, des ressortissants chinois ont été interpellés sur Metalkol à Musonoï (Kolwezi) pour exploitation illégale avec un appui présumé de certains officiels. Le phénomène s’étend : Haut-Uele en octobre 2025 sur des périmètres de Kibali Gold, et en Ituri où Comoi-SARL réclame 10 millions USD de dédommagements face à une entreprise chinoise.
Le secteur privé alerte sur l’ampleur du préjudice. D’après la FEC, une société minière aurait déjà perdu près de 3 milliards USD par spoliation de gisements. Lors d’une rencontre le 18 septembre 2025 avec la ministre des Mines, les opérateurs ont désigné l’envahissement des concessions comme problème central de l’industrie.
Le ministère promet des poursuites visant « toutes les personnes physiques et morales reconnues responsables, sans distinction de rang, de fonction ou de nationalité ». Le défi se situe ici : remonter la chaîne des responsabilités, y compris lorsque les connexions politico-administratives s’imbriquent dans le trafic. Les attentes portent sur des instructions rapides, une coordination effective entre parquet civil et justice militaire, et des actes concrets sur le terrain : contrôle des autorisations, audit des flux, vérification systématique des documents de traçabilité.
Si cette procédure aboutit, elle peut réduire la prime à l’illégal, rétablir la prévisibilité des droits miniers et sécuriser la liquidité des producteurs réguliers. L’épreuve de vérité se jouera dans la capacité à appliquer la même rigueur à tous les niveaux, y compris au sein de l’appareil d’État, dès que des responsabilités seront établies par les enquêtes.
— Peter MOYI






