Le gouvernement congolais intensifie ses efforts pour rendre plus lisible la gestion de ses ressources naturelles. Lors de la 133ᵉ réunion du comité exécutif de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE), tenue le 29 mai à Kinshasa, plusieurs décisions structurantes ont été adoptées, en présence du ministre des Mines, Kizito Pakabomba, et sous la présidence de Guylain Nyembo, Vice-Premier ministre chargé du Plan.
Le volet le plus stratégique abordé lors de cette session : la création d’une task-force dédiée au pilier Forêt du programme CAFI (Central African Forest Initiative), pour la période 2021-2031. L’objectif est clair : encadrer la gestion forestière à travers un suivi rigoureux des engagements pris avec les bailleurs internationaux. Cette cellule, placée sous la gouvernance de l’ITIE, devra veiller à la traçabilité des flux financiers, à la réduction de la déforestation, et à la lutte contre la mauvaise répartition des revenus issus du secteur forestier.
En 2023, la RDC a reçu plus de 25 millions de dollars de financement dans le cadre du partenariat CAFI, selon les données publiées par le secrétariat de l’initiative. Mais l’impact réel sur les communautés reste difficile à mesurer. La mise en place de cette task-force vise à combler cette opacité, tout en renforçant la gouvernance du secteur forestier, souvent miné par les coupes illégales et les concessions opaques.
Sur le plan institutionnel, la situation financière de l’ITIE-RDC s’améliore, d’après les documents soumis au comité. Les arriérés de fonctionnement ont été réduits de près de 60 % en deux ans, passant de 1,3 million de dollars à 520 000 dollars selon le dernier audit interne. Cette embellie est attribuée à une meilleure allocation budgétaire et au soutien de partenaires comme la Banque mondiale.
Toutefois, tout n’est pas aligné. Un incident récent impliquant l’exclusion d’un représentant de la société civile lors d’une session antérieure a jeté une ombre sur l’inclusivité du processus. Ce manquement au protocole de participation a été abordé frontalement par certains membres du comité, rappelant l’exigence d’un cadre équitable pour toutes les parties prenantes, y compris les ONG et les communautés locales.
La RDC se trouve à un carrefour sensible. Les flux issus des industries extractives représentent plus de 98 % des recettes d’exportation et environ 35 % du budget national, selon les chiffres de la Banque Centrale du Congo. Dans un tel contexte, la transparence ne peut rester une simple formalité. La volonté de bâtir une gouvernance responsable autour du secteur extractif et forestier se heurte encore à des résistances, mais des signaux d’ouverture se manifestent.
« Ce que nous construisons aujourd’hui, ce sont les bases d’un partenariat crédible entre l’État, les entreprises et les communautés », a déclaré un haut responsable du ministère du Plan, présent à huis clos. La prochaine phase du processus de validation ITIE prévue pour fin 2025 devra confirmer cette ambition.
En structurant une task-force dédiée à la gouvernance forestière, en renforçant le suivi budgétaire de l’ITIE et en s’ouvrant davantage au débat public, la RDC tente de sortir d’un modèle centré sur les rapports formels pour entrer dans une logique de redevabilité réelle. Le chemin reste long, mais les mécanismes se précisent.
— M. KOSI






