Par Mitterrand MASAMUNA, Journaliste en Économie
La République Démocratique du Congo (RDC) poursuit ses manœuvres financières audacieuses, cette fois-ci en titrisant une créance considérable en faveur de la Banque Centrale du Congo (BCC). Au travers du ministère des Finances, le gouvernement congolais a orchestré, le 10 octobre 2023, une émission d’Obligations du Trésor au profit de la BCC pour un montant significatif, culminant à 39,25 milliards de Francs congolais (CDF), soit une somme équivalant à près de 19,4 millions de dollars américains (USD), calculée selon le taux budgétaire de 2021, soit 2021 CDF pour un dollar américain.
Cette opération financière de grande envergure a été officialisée par un communiqué émanant de la Vice-Ministre des Finances, O’Neige N’sele, et rendu public le 16 octobre 2023.
Titrisation : Une Étape Stratégique
L’essence de cette démarche réside dans la titrisation de la créance que détient la Banque Centrale du Congo (BCC) envers le Trésor public. Concrètement, la maturité de ces instruments financiers est fixée à deux ans. Le remboursement, quant à lui, est prévu pour le 10 octobre 2025, date à laquelle le ou les soumissionnaires recevront l’intégralité du montant mis aux enchères.
Dans le domaine économique, une « Obligation du Trésor indexée » représente un instrument de dette à moyen ou long terme, caractérisé par une durée supérieure ou égale à trois ans, émis par le Trésor public d’un État, soit par le biais d’une syndication, rendant le titre accessible via un groupement d’établissements financiers, soit par le biais d’une adjudication, qui fonctionne sur le principe d’enchères.
Toutefois, la conséquence de cette émission d’Obligations du Trésor en faveur de la Banque Centrale du Congo signifie que le Trésor public de la RDC est désormais redevable envers la BCC. Pour s’acquitter de cette dette, le gouvernement émet des Obligations du Trésor, des instruments financiers assortis d’un taux d’intérêt défini et d’une période déterminée.
L’Art de la Titrisation
Suite à cette émission par le gouvernement, la BCC possède désormais la possibilité de titriser ses créances, c’est-à-dire de convertir en petits titres négociables ce qui lui est dû par le Trésor public. Cette manœuvre s’inscrit dans le cadre d’un éventuel assainissement des états financiers de la Banque Centrale du Congo.
La titrisation, tel que la pratique la BCC, implique la vente de ces créances à des particuliers ou à des entreprises. Cette démarche permet de retirer cette dette de son bilan, offrant ainsi un souffle financier bienvenu. La stratégie de titrisation, clairement un acte de gestion financière sophistiquée, permet ainsi de reconfigurer les passifs de la BCC en les transformant en des actifs négociables.
Cette opération financière témoigne de la prudence économique et des démarches innovantes mises en place par la République Démocratique du Congo pour gérer ses obligations financières. Elle offre un modèle d’ingéniosité financière qui pourrait servir d’exemple dans le domaine de la gestion des dettes souveraines. Les chiffres parlent d’eux-mêmes, et ils reflètent une approche stratégique de la gestion des finances publiques en RDC.