Lundi dernier, l’Algérie a franchi une nouvelle étape dans la réouverture de son marché aux produits espagnols. Après le dégel des relations commerciales le 14 janvier dernier, autorisant notamment l’importation de poussins et d’intrants agricoles d’Espagne, le pays nord-africain ouvre désormais ses portes à la viande fraîche ibérique. Cette décision, annoncée dans une note de l’Association professionnelle des banques et des établissements financiers (Abef), offre une opportunité stratégique à l’approche du mois de Ramadan, où la demande de viande connaît traditionnellement une hausse significative.
L’Espagne, mastodonte de l’exportation de viande
L’Espagne se positionne depuis une décennie comme un acteur majeur dans le commerce de la viande, avec une croissance impressionnante de ses exportations de 84%, atteignant 184 000 tonnes de viande bovine réfrigérée en 2022. Ces exportations alimentent principalement l’Union européenne, avec une contribution importante au Portugal, en Italie et en France, mais également vers des pays tiers tels que l’Algérie.
Les importations algériennes de viande espagnole, qu’elles concernent la viande réfrigérée ou les animaux sur pied, ont évolué, l’Espagne supplantant la France en offrant des petites carcasses à des prix attractifs. Selon l’USDA, l’exportation de viande représente un chiffre d’affaires considérable de 1,3 milliard de dollars pour l’Espagne.
Cette réussite s’appuie sur une croissance du cheptel de vaches laitières et le développement d’élevages intensifs, soutenus par des coopératives. Des stratégies d’intégration verticale, de la naissance des veaux à la vente de la viande, ont permis des économies d’échelle et renforcé la compétitivité espagnole sur le marché international.
Défis environnementaux et contraintes à venir pour l’Espagne
Cependant, malgré cette réussite, des défis se profilent pour la filière espagnole de la viande. Les sécheresses récurrentes affectent le cheptel bovin, entraînant une diminution en 2023. Des importations massives d’animaux bovins français de plus de 300 kg témoignent de cette contrainte, les veaux de cette catégorie nécessitant moins de fourrage.
L’aspect environnemental suscite également des préoccupations, avec des retards signalés dans la lutte contre la pollution aux nitrates. La Commission européenne critique l’Espagne sur ce front, tandis que des mouvements de colère des agriculteurs français soulignent les risques environnementaux associés à la surutilisation d’antibiotiques dans l’élevage.
Enfin, la dépendance aux importations de céréales et de matières azotées, accentuée par les sécheresses, augmente les coûts de l’alimentation animale, posant un défi économique supplémentaire à l’industrie espagnole.
Réflexions pour l’Algérie et perspectives d’avenir
Les subventions publiques à l’ensilage de maïs ont stimulé la filière bovine en Algérie, mais des obstacles tels que les taxes et les coûts logistiques entravent l’engraissement des jeunes veaux importés. La possibilité d’adopter des modèles d’intégration similaire à ceux mis en œuvre en Espagne est à l’étude, notamment dans le secteur ovin.
Il est crucial pour l’Algérie d’examiner de près l’efficacité de la filière espagnole tout en tenant compte des défis climatiques communs aux deux pays. Une approche éclairée pourrait permettre une optimisation des pratiques d’élevage et renforcer la sécurité alimentaire du pays.
Par la rédaction