Les prix agricoles connaissent une forte correction dans plusieurs localités du groupement de Batangi-Mbau, dans le territoire de Beni, au Nord-Kivu. En l’espace de trois mois, le bassin de patates douces est passé de 25.000 à 10.000 francs congolais. La farine de manioc, quant à elle, se négocie aujourd’hui à 8.000 contre 20.000 francs auparavant. Même tendance pour le charbon de bois dont le sac, autrefois cédé à 70.000 francs, s’échange désormais à 35.000.
Cette baisse généralisée des prix traduit un double effet d’offre. D’une part, le redéploiement sécuritaire des FARDC en appui aux troupes ougandaises (UPDF) a permis un retour partiel des cultivateurs dans leurs champs, notamment dans les zones de Mayi-Safi, Mama-Neema, Mukondi, Bango et Kainama. D’autre part, l’amélioration progressive de l’axe routier Eringeti-Kainama, en cours de réhabilitation depuis décembre 2024, facilite le désenclavement agricole et la logistique des produits vers les centres de consommation.
Sur le plan économique, ce mouvement suggère un rééquilibrage temporaire entre l’offre et la demande dans une région habituellement sujette à des tensions inflationnistes. En renforçant l’accessibilité physique des bassins de production, la relance des flux commerciaux a réduit les frictions logistiques qui, jusque-là, contribuaient à une formation des prix élevée. La multiplication des engins de transport a introduit une concurrence accrue sur les itinéraires de collecte, réduisant ainsi les marges des intermédiaires.
La situation actuelle illustre l’effet de transmission directe entre les variables sécuritaires, les infrastructures et les indicateurs de prix. Elle révèle également une dépendance critique des équilibres de marché à la stabilité opérationnelle des zones rurales. Si la tendance se poursuit, le pouvoir d’achat des ménages locaux pourrait se stabiliser, à condition que les circuits de distribution restent fonctionnels et que la sécurité demeure assurée.
Le contexte reste toutefois fragile. L’absence de dispositifs de stockage ou de structuration des chaînes de valeur agricoles pourrait limiter l’impact de cette baisse des prix sur le long terme. La Banque centrale du Congo, dans sa dernière note de conjoncture, pointait justement l’exposition des marchés périphériques aux effets de volatilité logistique, soulignant la nécessité d’un encadrement plus rigoureux de la filière agro-industrielle en période de reprise.
— Peter MOYI