Par Mitterrand Masamuna, Journaliste économique
Le paysage économique de la République Démocratique du Congo (RDC) est actuellement le théâtre d’une controverse financière significative. Au cœur de cette querelle se trouve le dossier SAMCRETE, un enjeu qui pourrait engendrer des conséquences financières considérables pour l’État congolais.
Le Centre de Recherche en Finances Publiques et Développement Local (CREFDL) a récemment émis un appel pressant à l’Inspection Générale des Finances (IGF) pour qu’elle prenne ses distances par rapport à certaines influences au sein du gouvernement congolais. Ces influences cherchent à obtenir la résiliation du contrat entre la RDC et la société SAMCRETE, qui porte sur la construction de la Route nationale n°1, reliant Mbuji-Mayi à Kananga.
Dans un communiqué daté du 27 octobre 2023, le CREFDL a exprimé son inquiétude quant à la sortie médiatique de l’IGF, accusant un détournement présumé des fonds alloués au projet de construction de la Route nationale n°1. Selon les informations fournies par l’IGF, seuls 3 millions de dollars ont été dépensés jusqu’à présent pour les travaux, et l’organisme de contrôle réclame la poursuite du projet avec un montant supplémentaire de 24 millions de dollars, qui auraient été détournés. Cependant, l’IGF refuse de valider un nouveau paiement de 29 millions de dollars en faveur de la société SAMCRETE, chargée de l’exécution des travaux.
Pour le CREFDL, les conclusions de l’IGF semblent hâtives et ne semblent pas reposer sur des bases comptables solides. Elles pourraient plutôt être motivées par une campagne orchestrée par des autorités publiques qui n’ont pas accès aux sources de financement du projet.
Il est essentiel de noter que le Fonds pour la Promotion de l’Infrastructure (FPI) avait déjà signé un contrat de réhabilitation pour la Route nationale n°1 en 2020. De plus, en décembre 2022, la Banque Africaine de Développement (BAD) a approuvé une ligne de crédit de 650 millions de dollars pour financer les travaux de cette même route. Cette somme est le double de l’estimation initiale, soit 302,863,635,87 USD, établie par les Égyptiens.
Selon les calculs du CREFDL, cette situation risque d’entraîner une surfacturation de 348 millions de dollars.
Le CREFDL s’interroge sur la capacité de l’IGF à évoquer un détournement des fonds et à l’imputer au FPI, alors que le projet est sous la tutelle du Directeur de Cabinet du Président de la République et de ses conseillers. L’un de ces conseillers est responsable des infrastructures, tandis que l’autre s’occupe des questions économiques et financières.
Le contrat entre le FPI et la société SAMCRETE porte sur la construction d’une route revêtue de 188 kilomètres pour un montant de 302,8 millions de dollars. Selon le CREFDL, l’article 12.5 du contrat prévoit le versement d’une avance de démarrage de 30 %, soit 90 millions de dollars, ainsi qu’une garantie bancaire. À ce jour, le FPI a versé seulement 9 % de cette avance, soit 27 millions de dollars, pour les lots I et II, évalués à 41,108,903,90 USD, soit 65,6 %. Un complément de 21 %, soit 63 millions de dollars, est encore attendu.
L’entreprise SAMCRETE a fourni une garantie bancaire d’un montant de 63 millions de dollars, en attendant le décaissement des fonds pour accélérer les travaux sur le terrain.
La révocation de ce contrat avec la société SAMCRETE, d’après le CREFDL, pourrait entraîner des conséquences juridiques et diplomatiques lourdes pour la RDC, notamment le recours à une procédure d’arbitrage à la Chambre de Commerce Internationale. Les dommages et intérêts réclamés pourraient s’élever au montant du contrat non décaissé, soit 275 millions de dollars, risquant ainsi de compromettre les relations diplomatiques et commerciales entre l’Égypte et la RDC.
Face à cette situation complexe, le CREFDL recommande au Chef de l’État, Félix Tshisekedi, d’exhorter l’Inspection Générale des Finances à respecter les clauses du contrat signé entre SAMCRETE et le FPI. La clarté économique et la transparence sont désormais cruciales pour éviter toute escalade de cette controverse aux conséquences potentiellement néfastes pour la RDC.