La République démocratique du Congo renforce son dispositif de régulation des échanges frontaliers avec le Burundi à travers l’évaluation du Régime commercial simplifié (RECOS), un mécanisme lancé officiellement le 30 octobre 2024 à Kavimvira (Sud-Kivu) et Gatumba (Burundi). Ce régime, issu des protocoles du COMESA, prévoit une franchise douanière quotidienne plafonnée à 500 dollars par commerçant, sans paiement des droits de douane. Il cible essentiellement les petits opérateurs économiques opérant dans un rayon de moins de 30 kilomètres autour de la frontière.
Le ministère du Commerce extérieur, en coordination avec le gouvernorat du Sud-Kivu, examine la portée réelle de cet instrument sur la fluidité des échanges et son impact sur la formalisation du commerce informel. Pour Kinshasa, ce régime représente une réponse technique à un double défi : capter des flux financiers échappant à l’État et désamorcer les tensions économiques dans une région où l’économie parallèle domine les circuits d’échange.
Selon des données compilées par le COMESA, plus de 70 % des transactions commerciales dans la région des Grands Lacs relèvent de circuits non enregistrés. L’instauration d’un seuil journalier de 500 dollars sans obligation douanière constitue une mesure incitative. Elle permet aux petits commerçants, en majorité des femmes, d’intégrer un cadre légal, réduisant ainsi leur exposition aux tracasseries administratives et à la corruption, régulièrement dénoncées aux points de passage.
Julien Paluku Kahongya, ministre congolais du Commerce extérieur, a rappelé que cette initiative s’inscrivait dans le cadre plus large du Projet de facilitation du commerce et d’intégration régionale (PFCIGL), soutenu par la Banque mondiale. Ce programme prévoit notamment la modernisation des postes frontaliers, la digitalisation des procédures douanières, et le développement d’infrastructures de soutien aux opérateurs économiques transfrontaliers. Les premiers financements ciblent les axes Bukavu–Bujumbura et Uvira–Kigoma, à fort potentiel commercial.
Le gouverneur du Sud-Kivu, Jean-Jacques Purusi, a quant à lui souligné la nécessité de lier cette politique commerciale à un agenda de stabilité régionale. La détérioration sécuritaire dans la zone – marquée par la persistance de groupes armés et la volatilité des relations avec le Rwanda – continue de compromettre l’efficacité de ces mécanismes économiques. Les récentes discussions évoquent la préparation d’un accord politique avec Kigali, sans qu’aucun calendrier officiel ne soit confirmé.
Le RECOS, bien qu’encore embryonnaire, cristallise les espoirs d’une diplomatie économique par le bas, misant sur la régularisation des échanges plutôt que sur les seules démarches sécuritaires. Si l’évaluation en cours révèle une hausse des volumes déclarés et une baisse des actes de corruption aux frontières, cela pourrait inciter d’autres provinces à généraliser ce régime. Pour cela, encore faudra-t-il des statistiques transparentes, des audits indépendants, et une volonté politique constante.
— Peter MOYI