Kinshasa, le 02 novembre 2023 – Dans une démarche résolue en faveur de la transparence financière, Resource Matters, une organisation dédiée à la surveillance des ressources, pousse à l’épicentre du débat économique la disparition des fonds de la Gécamines sous forme d’avances fiscales. Cette initiative saluée par les observateurs met en lumière la gestion trouble de ces fonds, principalement les 25,5 millions de dollars présumés détournés, impliquant des personnalités de premier plan.
Resource Matters tient à exprimer sa reconnaissance envers la Cour des Comptes pour son rôle déterminant dans la réouverture du dossier des avances fiscales de la Gécamines. Ces avances, d’un montant considérable, totalisant 25,5 millions de dollars, ont suscité des interrogations légitimes quant à leur destination et à ceux qui en ont bénéficié. Il est important de noter que ce montant ne représente qu’une fraction des avances fiscales qui restent introuvables.
Dans le sillage de ces développements, Resource Matters exhorte la justice à élargir le champ de son enquête pour déterminer les responsabilités et sanctionner les acteurs impliqués dans cette affaire. L’implication présumée de M. Albert Yuma, ancien PCA de la Gécamines, et Deogratias Mutombo, ancien gouverneur de la Banque Centrale du Congo, est au cœur de cette affaire qui remonte à plusieurs années. Toutefois, il est important de noter que les 25,5 millions de dollars en question ne représentent qu’une partie des avances fiscales disparues.
L’enquête menée conjointement par Resource Matters en collaboration avec le consortium Congo Hold-Up révèle que la Gécamines a effectué des paiements totalisant plus de 530 millions de dollars sur les comptes de la Banque Centrale du Congo entre 2012 et 2020. Ces paiements étaient qualifiés d’avances fiscales, c’est-à-dire des paiements de taxes effectués avant leur échéance officielle. Cependant, l’Inspection Générale des Finances (IGF) affirme que la majeure partie de ces fonds n’a jamais été reversée au Trésor Public, éveillant ainsi des soupçons sérieux quant à leur destination.
Les documents consultés par Resource Matters mettent en évidence des transferts directs de certaines avances fiscales vers des entreprises privées. Notamment, une somme de 8 millions de dollars a été retirée en liquide au guichet de la BGFIBank. Des entreprises privées telles que ‘Sud Oil’, qui semble exister uniquement sur papier, ont bénéficié de 15 millions de dollars, tandis que TEXICO, dont il est affirmé qu’elle est détenue par Albert Yuma et Norbert Nkulu, a reçu 5 millions de dollars.
À l’heure actuelle, la Cour des Comptes s’attèle à élucider le sort de 25,5 millions de dollars, dont 15 millions proviennent de la Gécamines et 10,5 millions du Trésor Public. Cette situation interpelle quant à la nécessité d’une révision sérieuse des mécanismes de contrôle et de suivi des avances fiscales.
Il est également révélé que d’anciens ministres des finances ont ordonné aux régies financières de traiter ces montants comme s’ils avaient été effectivement versés au Trésor Public. Plus précisément, ils ont sollicité des régies financières l’émission de « titres » reconnaissant le versement des avances fiscales, même si aucune preuve tangible ne confirme que ces montants ont bien été encaissés par l’État. La Direction Générale des Impôts (DGI) a ainsi reconnu avoir « perçu » plus de 340 millions, la Direction Générale de la Régie d’Avances (DGRAD) a reconnu plus de 121 millions, et la Direction Générale de la Régie des Dépenses (DGRAD) a reconnu plus de 60 millions. Cependant, lors d’un atelier de l’Initiative de Transparence dans les Industries Extractives, les représentants de ces régies ont eux-mêmes confirmé n’avoir aucune trace de ces avances.
Resource Matters condamne fermement ces pratiques de titrisation et de compensation systématiques effectuées par les régies financières sur la simple base d’une lettre du Ministre des Finances, en l’absence de toute preuve attestant que ces fonds ont été effectivement perçus par le Trésor Public.
Nous saluons l’Initiative Générale des Finances, qui a ordonné à toutes les régies financières de suspendre ces compensations, en raison de leur illégalité. De surcroît, plus de 315 millions de dollars demeurent inexpliqués, sans aucune preuve de leur encaissement par l’État.
Resource Matters encourage la Cour des Comptes, en pleine enquête, l’IGF, ainsi que les instances judiciaires, à poursuivre avec détermination toute personne impliquée dans le détournement de ces avances fiscales. Cette situation entrave les capacités financières de l’État congolais et de la société Gécamines, essentielles à la relance de leurs activités respectives. Nous plaidons en faveur d’un procès public et médiatisé pour que toute la lumière soit faite sur cette affaire, décourageant ainsi les actes préjudiciables au développement du pays.
Pour plus d’informations, veuillez contacter : info@resourcematters.org
Jean-Pierre Okenda : +243 829 781 977