Les enjeux liés à l’exploitation minière en République démocratique du Congo (RDC) reviennent une fois de plus sous le feu des projecteurs, avec une affaire qui soulève des préoccupations profondes sur la gestion des ressources naturelles du pays. Un récent rapport des Nations unies met en évidence une exportation frauduleuse de 150 tonnes de coltan vers le Rwanda. Cette opération serait orchestrée par la coalition rebelle AFC-M23, soutenue par Kigali, selon les conclusions des enquêteurs.
Au cœur de cette affaire, la localité de Rubaya, un site minier stratégique situé à quelques dizaines de kilomètres de Goma. Cette zone, passée sous le contrôle des rebelles depuis avril 2024, est devenue le théâtre d’une exploitation parallèle, échappant totalement aux autorités congolaises. L’administration rebelle en place, selon les experts onusiens, supervise non seulement l’extraction du minerai, mais aussi l’ensemble du circuit commercial : transport, taxation et exportation. Une organisation bien rodée qui permet d’écouler des quantités importantes de coltan sur le marché international, sous une origine falsifiée.
Le rapport souligne que le minerai extrait illégalement est mélangé à la production rwandaise avant d’être exporté. Cette pratique compromet la traçabilité des minéraux dans la région et pose de sérieux problèmes éthiques aux acheteurs internationaux. En effet, cette contamination des chaînes d’approvisionnement contribue à alimenter les conflits armés et prive la RDC des revenus essentiels à son développement.
Dans le silence relatif des institutions locales, certaines voix s’élèvent pour dénoncer l’ampleur des dégâts. Des habitants de Rubaya ont signalé la distribution de matériel par les rebelles pour intensifier l’exploitation, une manœuvre visant à maximiser les bénéfices en un temps record. Cette stratégie met en lumière l’urgence d’un cadre de régulation plus strict pour les ressources naturelles de la RDC.
Ce commerce illicite, pourtant bien documenté, témoigne des défis persistants auxquels fait face la RDC : absence de contrôle sur certaines régions, ingérence étrangère, et faiblesse des mécanismes internationaux de certification. Au-delà des chiffres alarmants, cette affaire révèle une problématique plus large, celle de la souveraineté économique dans un contexte minier mondialisé où les intérêts locaux et internationaux s’affrontent constamment.
Dans un pays riche en ressources mais marqué par des inégalités criantes, la question reste posée : comment rétablir une gouvernance minière transparente et équitable, pour que ces richesses profitent d’abord aux populations locales ? Une interrogation qui, pour l’instant, reste sans réponse claire.
— Peter MOYI