La production agricole en RDC reste largement sous-exploitée. Sur près de 80 millions d’hectares de terres arables, moins de 10% sont effectivement cultivés. Ce potentiel dormant contraste avec les besoins alimentaires croissants d’une population qui a franchi le cap des 100 millions d’habitants en 2023.
Dans les campagnes, le manioc s’impose comme la pierre angulaire de l’alimentation. Plus de 30 millions de tonnes sont produites chaque année, plaçant la RDC au troisième rang mondial.

Les régions du Bandundu, de l’Équateur, des Kasaï et des Kivus assurent l’essentiel de cette production. La banane plantain suit avec près de 4,7 millions de tonnes, concentrée dans l’ex-province Orientale et les Kivus. Quant au maïs et au riz paddy, ils stagnent autour de 2 millions et 990 000 tonnes respectivement.
Tableau 1 – Principales cultures agricoles en RDC (moyenne récente)
Culture | Volume annuel (tonnes) | Régions principales de production |
---|---|---|
Manioc | ~30 000 000 | Partout (Bandundu, Équateur, Kasaï, Kivus, etc.) |
Banane plantain | ~4 700 000 | Ex-Orientale (Ituri…), Kivus, Équateur |
Maïs | ~2 000 000 | Katanga, Kasaï, Kwilu, Kongo-Central, Kinshasa |
Riz (paddy) | ~990 000 | Ituri/Haut-Uele, Kasaï, Kwilu, Kongo-Central |
Huile de palme | ~1 100 000 | Équateur, Ituri (Tshopo), Kongo-Central |
La filière du cacao a connu un bond spectaculaire. De 3 600 tonnes exportées en 2018, la RDC est passée à plus de 32 500 tonnes en 2022, devenant le deuxième exportateur africain de cacao biologique. Cette montée en puissance s’appuie sur des plantations réhabilitées dans le Bandundu et l’Ituri.
Tableau 2 – Principaux produits agricoles exportés par la RDC (2022-2023)
Produit | Volume exporté (année récente) | Valeur estimée | Principaux marchés d’exportation |
---|---|---|---|
Cacao | 32 505 tonnes (2022) | ~50+ M USD | Belgique, Malaisie, Pays-Bas, États-Unis… |
Café | ~12 400 tonnes (2023) | ~20–30 M USD (est.) | UE (Italie, Allemagne, Belgique), Moyen-Orient |
Thé | ~3 600 tonnes (2018) | ~5 M USD (est.) | Pakistan, Europe de l’Est, EAC (Kenya…) |
Caoutchouc | ~1 300 tonnes (2019) | ~2 M USD (est.) | Chine, Singapour (caoutchouc brut) |
Autres | (Quinquina, huiles, etc.) faibles | faible | (Niche : Inde, Europe) |
Malgré ces progrès, la RDC reste massivement dépendante des importations alimentaires. Blé, riz, sucre, huiles végétales… En 2023, la facture d’importations agroalimentaires a frôlé les 2 milliards de dollars, selon les données de la Banque mondiale. Le blé représente à lui seul plus de 700 000 tonnes importées chaque année, faute de production locale adaptée au climat tropical.
Tableau 3 – Principaux produits importés et leurs fournisseurs (années récentes)
Produit importé | Volume annuel (estimation) | Fournisseurs majeurs |
---|---|---|
Blé (grain & farine) | ~700–800 k tonnes | UE (France, Pologne), Russie, Inde, Canada |
Riz blanc | ~350–400 k tonnes | Pakistan, Inde, Thaïlande, Vietnam |
Sucre raffiné | ~200–250 k tonnes (est.) | Brésil, Inde, Afrique du Sud |
Huiles végétales | ~150 k tonnes (est.) | Malaisie, Indonésie, UE (huile de palme, tournesol) |
Viande de volaille | ~100 k tonnes (est.) | Brésil, UE (Belgique, Pologne), USA |
Lait en poudre | ~30 k tonnes (est.) | UE (France, Belgique), Nouvelle-Zélande |
L’enclavement des zones rurales handicape fortement le secteur. Les coûts de transport élevés, l’absence d’infrastructures de stockage et les pertes post-récolte réduisent la rentabilité des cultures. Parallèlement, l’accès aux financements agricoles reste embryonnaire : moins de 1% des crédits bancaires sont dirigés vers l’agriculture.
La loi agricole de 2011, imposant une majorité congolaise dans le capital des entreprises agricoles, freine également l’afflux d’investissements étrangers. Et les conflits récurrents à l’Est du pays, notamment au Nord-Kivu et en Ituri, privent l’agriculture congolaise de certaines de ses meilleures terres.
Pourtant, des signaux positifs apparaissent. En 2023, les intentions d’investissements agricoles ont bondi à 481 millions de dollars, contre seulement 32 millions deux ans plus tôt. Le programme national de développement de l’agriculture, appuyé par la Banque mondiale, a déjà permis de soutenir près de 200 000 petits exploitants.
Le cacao bio, le café de spécialité et l’huile de palme durable figurent parmi les secteurs les plus prometteurs à l’export. Sur le plan domestique, la forte croissance urbaine, notamment à Kinshasa, ouvre un vaste marché pour les produits agroalimentaires transformés localement.
Reste à lever les freins structurels : moderniser les infrastructures, faciliter l’accès au foncier, améliorer la gouvernance et renforcer la sécurité rurale. Si ces chantiers avancent, la RDC pourra non seulement nourrir sa population, mais aussi redevenir un acteur agricole de poids en Afrique centrale.
— M. KOSI