Airtel RDC veut élargir son réseau Internet dans les villages éloignés de la RDC. Pour y arriver, l’entreprise va utiliser Starlink, un système de connexion par satellite développé par SpaceX. Ce partenariat va permettre à Airtel de couvrir des zones où il est difficile ou trop cher d’installer la fibre ou d’autres infrastructures classiques. Résultat attendu : un Internet plus rapide, plus stable et plus abordable pour des millions de Congolais encore mal desservis.
L’accord, officialisé à Dubaï le 5 mai 2025, vise l’intégration progressive de Starlink dans quatorze marchés africains où Airtel est actif. La République démocratique du Congo figure parmi les premiers pays à bénéficier de cette initiative, Starlink y ayant récemment obtenu sa licence d’exploitation. Pour Airtel RDC, c’est une opportunité technique et commerciale d’envergure dans un contexte de forte croissance du besoin en connectivité.
Le plan repose sur une interconnexion directe entre les antennes relais isolées d’Airtel et le réseau satellitaire de Starlink. Ce système permet d’éviter les coûteuses infrastructures terrestres et de contourner les contraintes liées à la fibre ou aux technologies VSAT. Un expert en télécoms contacté précise que cette solution devrait réduire les coûts d’installation de 40 à 60 % dans certaines régions, tout en améliorant significativement la qualité du service.
« Nous voulons apporter un Internet rapide, fiable et abordable dans les zones les plus reculées de la RDC », indique un cadre d’Airtel RDC. « Ce partenariat avec Starlink est un levier pour accélérer la couverture nationale. »
En parallèle, Airtel entend utiliser cette connectivité améliorée pour développer des services numériques destinés aux écoles, centres de santé, administrations locales et PME. L’enjeu est autant économique que social : aujourd’hui, seuls 47,5 % des Congolais accèdent régulièrement à Internet selon les dernières statistiques de l’ARPTC. La fracture numérique reste particulièrement visible dans les provinces de l’Est et du Nord.
Sur le marché, cette alliance repositionne Airtel dans la course à la conquête de nouveaux abonnés. D’après la GSMA, 15 millions de nouveaux utilisateurs mobiles sont attendus en RDC d’ici 2030. Airtel, qui représentait fin 2024 environ 29,3 % des abonnements Internet mobiles avec 9,6 millions d’utilisateurs, vise une croissance à deux chiffres sur ce segment d’ici trois ans.
Mais c’est sur le terrain des revenus que la société devance déjà ses concurrents. Elle domine actuellement le marché congolais de l’Internet mobile avec 365,5 millions de dollars de chiffre d’affaires, soit près de 38 % de parts, selon les données du régulateur. Cette avance s’explique en partie par des investissements stratégiques dans la modernisation du réseau et l’offre data.
Face à elle, Orange et Vodacom ne restent pas inactifs. En janvier 2025, les deux opérateurs ont annoncé une coentreprise pour déployer des stations de base mobiles alimentées à l’énergie solaire, avec un objectif similaire : renforcer leur présence dans les zones rurales à moindre coût.
L’entrée de Starlink en RDC introduit un nouvel acteur dans cet échiquier numérique. L’entreprise de technologie spatiale américaine, encore perçue comme élitiste par les particuliers à cause du prix de ses équipements (299 dollars le mini-kit, 29 à 40 dollars/mois l’abonnement), pourrait désormais viser une clientèle plus large. En s’associant à un opérateur local comme Airtel, Starlink bénéficie d’un relais commercial, logistique et réglementaire essentiel pour adapter ses offres au pouvoir d’achat local.
Reste à savoir si l’offre d’Airtel avec Starlink sera compétitive et opérationnelle dès le lancement commercial annoncé pour mai 2025. Des questions subsistent sur la capacité à assurer une maintenance efficace du matériel dans les zones enclavées et sur la soutenabilité des tarifs. Pour l’heure, la société assure avoir déjà identifié plusieurs sites pilotes dans les provinces du Kasaï et du Haut-Uélé.
Cette initiative pourrait aussi inspirer d’autres pays africains à adopter des modèles hybrides combinant réseaux terrestres et satellites. D’autant que la demande en Internet dépasse désormais les grandes villes, poussée par l’essor de l’enseignement à distance, des services financiers mobiles et du commerce en ligne.
Si elle tient ses promesses, la collaboration Airtel–Starlink pourrait repositionner la RDC sur la carte du numérique africain. Une avancée concrète, portée par une technologie spatiale mais ancrée dans des besoins bien réels.
— Peter MOYI