L’Afrique est depuis plusieurs années le terrain d’une lutte d’influence entre puissances mondiales, et l’Angola s’impose désormais comme une pièce maîtresse de cette rivalité économique. Avec ses vastes ressources naturelles et ses infrastructures stratégiques, ce pays d’Afrique centrale attire des investissements considérables de la part des grandes puissances, en particulier des États-Unis et de la Chine. La visite de Joe Biden en octobre 2024 met en lumière cette course pour la maîtrise des routes d’exportation des ressources minières du continent.
Un pays clé pour les investissements américains
L’Angola a attiré l’attention de Washington ces dernières années, non seulement en raison de ses ressources en pétrole, dont il est le deuxième exportateur en Afrique, mais aussi pour son rôle stratégique dans les infrastructures de transport. Le projet phare dans lequel les États-Unis ont choisi d’investir est le corridor de Lobito, un axe ferroviaire de 1 300 kilomètres reliant le port de Lobito à Lubumbashi, en République Démocratique du Congo. Ce projet revêt une importance capitale pour l’économie américaine, notamment dans la sécurisation des voies d’exportation des minerais essentiels tels que le cuivre et le cobalt, des ressources incontournables pour les industries technologiques et énergétiques.
Derrière cet engagement, il est question pour les États-Unis de se positionner face à l’hégémonie chinoise, qui contrôle déjà une part significative des infrastructures africaines, avec près de 60% des échanges commerciaux de l’Angola se faisant avec Pékin. En effet, la Chine a depuis longtemps identifié l’importance stratégique de l’Angola et y a massivement investi, notamment dans la modernisation du côté angolais de cette même voie ferroviaire, avec plus de 2 milliards d’euros.
Infrastructures : une course entre grandes puissances
La réhabilitation du corridor de Lobito, initialement lancée par des investisseurs chinois, est désormais au centre d’une compétition entre les puissances occidentales et la Chine. Les États-Unis, en partenariat avec l’Europe, ont d’ores et déjà mobilisé 630 millions d’euros pour rénover une partie du corridor, notamment sur le tronçon congolais. Ce projet vise à faciliter l’exportation des ressources minières de la RDC via la côte ouest de l’Afrique, offrant ainsi une alternative aux routes traditionnelles dirigées vers l’est.
Cette rivalité s’illustre également par la réponse de la Chine, qui cherche à revitaliser la ligne ferroviaire Tazara, reliant la Zambie et la RDC à l’océan Indien via la Tanzanie. Ce projet alternatif pourrait permettre à la Chine de continuer à jouer un rôle prépondérant dans l’exportation des minerais africains, cette fois par la côte est.
Washington, quant à lui, propose désormais de prolonger le corridor de Lobito jusqu’à Dar es Salaam, en Tanzanie, une initiative visant à consolider la présence américaine dans cette région clé. Cette démarche témoigne de l’importance croissante pour les grandes puissances de sécuriser les routes d’exportation, élément central dans la gestion des chaînes d’approvisionnement mondiales.
L’Angola, un acteur incontournable dans la géopolitique des ressources
Si l’Angola devient un champ de bataille pour les grandes puissances, c’est avant tout en raison de ses ressources stratégiques et de sa position géographique clé. Le pays, avec ses réserves de pétrole et de minerais, est l’un des derniers bastions en Afrique à entretenir des relations équilibrées avec les capitales occidentales. Contrairement à d’autres nations africaines qui s’éloignent des alliances traditionnelles pour se tourner vers des partenaires émergents, l’Angola reste ouvert à des accords commerciaux avec les États-Unis et l’Europe, tout en maintenant des relations étroites avec la Chine.
Cette flexibilité économique permet à Luanda de jouer un rôle stratégique dans la redéfinition des alliances mondiales en Afrique. Pour Washington, il est impératif de préserver et de renforcer ce partenariat. Loin de se limiter à un simple enjeu commercial, la visite de Joe Biden en Angola traduit un désir plus profond de positionner les États-Unis comme un acteur incontournable dans le développement des infrastructures africaines, tout en réduisant l’influence chinoise sur le continent.
En définitive, l’Angola se retrouve au centre d’une compétition mondiale où chaque puissance tente de sécuriser son accès aux ressources naturelles et aux infrastructures stratégiques. Ce pays, autrefois discret sur la scène internationale, s’impose désormais comme un acteur clé dans la géopolitique des ressources, un enjeu majeur pour l’avenir de l’Afrique.
M. MATUVOVANGA