L’escalade de la concurrence entre les États-Unis et la Chine pour l’accès aux minéraux critiques en Afrique a récemment pris une tournure significative, marquée par des engagements financiers substantiels destinés à renforcer les infrastructures ferroviaires sur le continent. Avec plus d’un milliard de dollars alloués par Pékin pour la rénovation de la liaison ferroviaire entre la Zambie et la Tanzanie, et un investissement de plus de 250 millions de dollars par Washington pour améliorer le réseau ferré entre la République démocratique du Congo (RDC) et l’Angola, l’objectif est clair : faciliter l’exportation du cuivre africain. Cette stratégie d’investissement met en lumière la bataille pour l’influence dans le secteur crucial des minéraux critiques, essentiels à la transition énergétique mondiale.

Selon le Centre européen pour la gestion des politiques de développement (ECDPM), cette rivalité offre aux nations africaines une fenêtre d’opportunité pour négocier le développement local de ces ressources précieuses. Un rapport de novembre 2023, intitulé « Green industrialisation: Leveraging critical raw materials for an African battery value chain », suggère que les leaders africains devraient orienter les discussions avec ces puissances vers des investissements dans la chaîne de valeur des batteries électriques, exploitant ainsi au mieux les ressources minérales du continent.
Actuellement, les investissements se concentrent principalement sur l’extraction minière et les infrastructures logistiques nécessaires pour transporter rapidement les matières premières hors d’Afrique. Une stratégie plus inclusive, permettant le développement de chaînes de valeur locales, semble donc être une avenue prometteuse pour une coopération plus étroite.
Le rapport met également en garde contre une approche perçue comme unilatérale par les partenaires internationaux, qui pourrait renforcer la méfiance existante entre l’Afrique et ses investisseurs étrangers. Il est crucial de dépasser la simple extraction des ressources pour contribuer au développement réel du continent.
Les implications de la compétition sino-américaine pour l’Afrique
Le retard des États-Unis par rapport à la Chine dans le secteur minier africain a incité Washington à utiliser la demande africaine en infrastructures de transformation locale comme un levier concurrentiel. Cela s’illustre par le soutien américain à la construction d’une usine en Tanzanie, qui devrait commencer à produire du nickel de qualité pour batteries d’ici 2026, destiné aux marchés américain et international.
Cette initiative s’inscrit dans un effort plus large pour développer une chaîne de valeur transfrontalière intégrée pour les batteries électriques, illustré par un accord tripartite signé avec la RDC et la Zambie en décembre 2022. Avec le Partenariat pour la sécurité des minéraux, les États-Unis envisagent d’étendre ces collaborations à d’autres nations africaines, en partenariat avec l’UE, le Canada et l’Australie.
Les bénéfices potentiels et les défis à surmonter

La mise en œuvre de ces projets pourrait significativement accroître les revenus des pays africains riches en minéraux critiques. Alors que l’Afrique ne devrait capter que 55 milliards de dollars sur une chaîne de valeur des batteries et véhicules électriques estimée à 8800 milliards de dollars d’ici 2025, une intégration plus profonde dans cette chaîne pourrait révolutionner les perspectives économiques du continent.
Cependant, des défis subsistent, notamment en termes de financement, de réglementation et de capacités techniques. Le développement d’une industrie locale nécessitera des investissements considérables et une coopération internationale soutenue pour réaliser le plein potentiel de l’Afrique dans la nouvelle économie globale des minéraux critiques.
En résumé, l’intérêt croissant de la Chine et des États-Unis pour les minéraux critiques africains représente une opportunité unique pour le continent de négocier son rôle dans la chaîne de valeur mondiale, en allant au-delà de la simple extraction pour atteindre une transformation et une valorisation locale accrues. La clé du succès résidera dans la capacité des pays africains à naviguer habilement dans cette dynamique géopolitique, en tirant parti de leur position pour attirer des investissements stratégiques qui favorisent un développement durable et inclusif.
Par L’ÉDITORIAL