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Malgré le financement de 100 millions de dollars du programme PAPAKIN, l’absence de garanties foncières limite l’accès des petits agriculteurs congolais aux financements.

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Le secteur agricole en République démocratique du Congo (RDC) contribue à environ 20 % du produit intérieur brut (PIB) et emploie près de 70 % de la population active. Cependant, l’accès au financement formel pour les agriculteurs et les entreprises agroalimentaires demeure restreint, entravant le développement agricole du pays.

Les institutions financières, notamment les banques commerciales, perçoivent le secteur agricole comme risqué. Cette perception découle de facteurs tels que l’instabilité climatique, le manque de garanties foncières, des infrastructures insuffisantes et la volatilité des prix des produits agricoles. De plus, la présence limitée des banques dans les zones rurales, où se concentrent 80 % des activités agricoles, complique davantage l’accès au crédit pour les agriculteurs. Les rares prêts disponibles affichent souvent des taux d’intérêt élevés, dépassant 15 %, décourageant ainsi les petits producteurs.

Certaines banques commerciales ont initié des programmes pour financer l’agriculture. Par exemple, Rawbank propose des crédits aux coopératives agricoles en partenariat avec des institutions internationales. De même, EquityBCDC collabore avec des projets agro-industriels, tandis qu’Ecobank RDC offre des produits adaptés aux petites et moyennes entreprises agroalimentaires. Cependant, ces initiatives ciblent principalement les grandes exploitations, laissant de côté une grande partie des petits agriculteurs.

Pour pallier ces lacunes, des initiatives publiques et internationales ont été mises en place. Le gouvernement congolais, en collaboration avec des partenaires tels que la FAO et la Banque africaine de développement, a lancé des fonds de garantie pour couvrir une partie des risques liés aux prêts agricoles. Des projets comme le Programme d’appui à la productivité agricole et à la commercialisation (PAPAKIN), financé à hauteur de 100 millions de dollars par la Banque mondiale, visent à améliorer l’accès au crédit via des institutions financières locales. Par ailleurs, des institutions de microfinance, telles que FINCA RDC, offrent des microcrédits aux agriculteurs, bien que ces prêts soient souvent de montants modestes et à court terme.

Malgré ces efforts, des obstacles persistent. L’absence de titres fonciers officiels empêche les agriculteurs de fournir des garanties pour obtenir des prêts. De plus, le manque de données fiables complique l’évaluation de la solvabilité des emprunteurs par les banques. Enfin, un climat des affaires défavorable, marqué par la corruption, l’insécurité et l’instabilité politique, décourage les investissements dans le secteur agricole.

Pour améliorer l’accès au crédit agricole, plusieurs mesures sont recommandées. Renforcer les partenariats public-privé pourrait permettre une meilleure répartition des risques entre les différentes parties prenantes. Le développement de l’assurance agricole offrirait une protection contre les aléas climatiques. La digitalisation des services financiers, notamment via le mobile banking, pourrait faciliter l’accès au financement dans les zones rurales. Enfin, la formation des agriculteurs aux pratiques financières et à la gestion de projets renforcerait leur capacité à accéder et à gérer efficacement les crédits.

En 2023, la RDC a relancé le Plan national d’investissement agricole (PNIA), visant à mobiliser 1,5 milliard de dollars pour moderniser l’agriculture. Les banques commerciales pourraient jouer un rôle essentiel dans ce plan, à condition que des réformes structurelles, telles que la sécurisation foncière et l’amélioration des infrastructures, soient mises en œuvre.

En conclusion, bien que des initiatives existent pour intégrer les banques commerciales dans le financement agricole en RDC, leur impact reste limité sans un environnement propice. Une approche intégrée, associant l’État, les bailleurs de fonds et le secteur privé, est essentielle pour exploiter pleinement le potentiel agricole du pays.

— M. MATUVOVANGA

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